dimanche 13 novembre 2016

Stéphane Lhomme - Point juridique sur le refus communal de compteurs Linky

Refus des compteurs Linky par les
communes : le point juridique

Condamnations ou pas, risques juridiques et financiers, rôle
partisan de l'AFP et de l'Association des maires de France...

Au moment où nous écrivons ces lignes, environ 300 communes en France ont pris des délibérations contre le déploiement des compteurs communicants, à commencer par le fameux Linky. La plupart ont vu leurs délibérations attaquées en justice administrative par Enedis et/ou les préfets. Beaucoup d'informations fausses circulent à propos de ces procédures, voici les réponses aux questions que vous vous posez probablement.

Est-il vrai que « les préfets annulent les délibérations municipales anti-Linky » ?
NON : Le préfet, tout comme Enedis, peut seulement faire un «recours gracieux», c'est-à-dire demander à la commune de bien vouloir retirer sa délibération. Mais la commune n’est absolument pas obligée d’obtempérer. Il lui suffit de répondre, sans même avoir besoin de donner plus d'explications, qu’elle n’a pas la même analyse et que, de fait, elle maintient sa délibération. Le préfet ou Enedis peuvent ensuite saisir le Tribunal administratif pour essayer de faire annuler la délibération municipale, sans garantie de succès.

Est-il vrai que les communes qui ont pris des délibérations anti-Linky sont « poursuivies en justice » ou « se retrouvent avec des procès sur le dos » ?
NON : ces formules sont délibérément utilisées pour intimider les élus locaux, mais on ne peut pas comparer une procédure en justice administrative contre une délibération municipale avec le fait d'être « poursuivi en justice » comme des criminels ou des gangsters. Il arrive toutes les semaines en France que des délibérations municipales soient contestées en justice administrative (par le préfet, par une entreprise, par un administré, etc), cela n'a rien d'exceptionnel ou de grave. Les maires et autres élus municipaux n'iront pas aux galères !

La commune doit-elle lancer une procédure au Tribunal administratif pour maintenir sa délibération ?
NON : la commune n'a rien à faire, ce sont les plaignants, le Préfet ou Enedis, qui doivent saisir le Tribunal administratif s'ils veulent essayer de faire annuler la délibération municipale.

Est-il vrai que des délibérations municipales « anti-Linky » ont été annulées par les Tribunaux administratifs ?
NON. Plusieurs délibérations ont été visées par des procédures en référé (*) qui donnent lieu à des jugements provisoires en attendant les vrais jugements, sur le fond mais, du fait des délais de la justice, ces jugements ne sont pas attendus avant fin 2017. La plupart des communes n'ont pas reçu de référé mais directement les documents pour la procédure sur le fond.

Est-il vrai que les communes qui ont pris des délibérations municipales sont condamnées financièrement ?
NON (sauf à Bordeaux) : à chaque procédure en référé, Enedis demande au Tribunal administratif une pénalité de 4000 euros pour « punir » les communes anti-Linky et dissuader les autres de prendre à leur tour des délibérations. Cela démontre que Enedis et son programme Linky n'ont que mépris pour la démocratie locale, les élus municipaux et les habitants.

Heureusement, dans la quasi totalité des cas, les Tribunaux administratif refusent de condamner les communes à verser de l'argent à Enedis… sauf au Tribunal administratif de Bordeaux, ou Enedis semble faire la loi : deux petites communes du Périgord ont été condamnées à payer 1200 euros à Enedis. Cependant, une souscription solidaire a permis de rassembler bien plus que ces sommes.
Notons que l'AFP a édité une dépêche insistant lourdement sur cette condamnation, de même que l'Association des maires de France (Maire-info) qui l'a immédiatement fait savoir à toutes les communes de France, mais ces deux structures partisanes se sont bien gardées de dire qu'il s'agissait seulement d'un jugement provisoire et que la souscription avait plus que remboursé ces pénalités.

Les procédures en référé (urgence) sont-elles justifiées ?
NON : comment justifier ces procédures en référé contre des communes où la pose des Linky est prévue en 2019 ou 2020 ? La procédure sur le fond aboutira en 2017 ou dans le pire des cas début 2018, pourquoi donc juger ces communes en urgence ?

On note d'ailleurs que ce sont de toutes petites communes qui sont poursuivies en référé : elles ont donc été soigneusement choisies par Enedis pour leur vulnérabilité, ce qui confirme que cette entreprise agit désormais comme les pires multinationales.

Il y a là une véritable instrumentalisation de la justice administrative par Enedis et il est incompréhensible que des juges administratifs acceptent d'être ainsi utilisés : en toute logique, ils devraient débouter Enedis en référé et renvoyer l'affaire à la procédure de fond.

Les communes qui ont délégué leur compétence à un Syndicat départemental d'énergie peuvent-elles prendre une délibération « anti-Linky » ?
OUI : le « camp du Linky » (Enedis, les préfets, les présidents de syndicats départementaux d'énergie, l'Association des maires de France, etc) prétend que la commune n'a plus son mot à dire et même que les compteurs d'électricité ne lui appartiennent plus (**)... alors qu'il n'y a pas eu de vente ou de transfert ! 

Ces affirmations en forme d'intimidation méritent donc d'être expertisées juridiquement, et il faudra attendre les jugements sur le fond, fin 2017 ou début 2018, pour en avoir le cœur net. De fait, d'ici là, toute commune peut sans crainte prendre la position qu'elle souhaite, sans se laisser intimider par les « autorités » et l'industriel Enedis.
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(*) Référé et déféré ?
Tout comme les médecins du temps de Molière parlaient latin pour laisser les patients dans l'ignorance, la justice n'a pas son pareil pour embrouiller les citoyens avec des termes obscurs et, qui plus est, très proches.
Ainsi, la plupart des communes reçoivent un DÉFÉRÉ pour une procédure sur le fond contre la délibération anti-Linky. Mais certaines sont aussi attaquées en RÉFÉRÉ : c'est une procédure d'urgence qui aboutit à un jugement provisoire dans l'attente du jugement sur le fond. Déféré ou référé, faites bien attention aux termes présents sur les documents que vous recevez.

(**) Pour mémoire, depuis le 1 janvier 2005 - date de scission d'EDF en plusieurs entreprises : EDF SA, RTE, Enedis (auparavant ErDF) - les compteurs d'électricité appartiennent à la commune : pas seulement ceux des bâtiments communaux, TOUS les compteurs d'électricité présents dans la commune.

4 commentaires:

  1. Les communes ne peuvent manquer d'arguments.

    le décret 2010-1022 du 31 aout 2010 rend obligatoire la mise en œuvre des compteurs communicants par les gestionnaires de réseaux électriques. Certes.

    Or ce décret 2010-1022 a été abrogé par le nouveau décret 2015-1823 du 30 décembre 2015. Je ne vois pas trace d'un nouveau décret. Sommes-nous là sur une faille juridique ? Je ne suis pas juriste, alors....

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  2. Alors? serions extrêmement intéressés par une réponse rapide, svp

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    1. Nous avons discuté de tout cella vendredi soir, au cours d'une réunion-débat à Bouguenais près de Nantes.

      Malgré les menaces, les maires peuvent parfaitement prendre des arrêtés interdisant le déploiement pendant un certain temps (par exemple jusqu'au 31 décembre 2021). Sur le site de Stéphane Lhomme vous avez des modèles pour ces interventions. Il est venu récemment dans votre ville. Vous le connaissez sans doute.

      Pour le droit de refuser, je rappelle la vidéo où Philippe Monloubou, président d'ENEDIS, avoue devant une commission parlementaire (le détail a du poids) qu'il ne peut pas obliger quelqu'un à recevoir le compteur. Il faut rappeler que la loi oblige ENEDIS à déployer les Linky, mais elle n'oblige pas les citoyens à l'accepter. Les intimidations, les menaces ne sont que cela.

      J'espère avoir satisfait au moins en partie vos questions. Cordialement

      Jean-Claude

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    2. Je vous prie de m'excuser, je pensais à Parthenay tout court, où Stéphane Lhomme est venu ces jours-ci. Son adresse de site est :
      http://refus.linky.gazpar.free.fr/

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